Le président turkmène Saparmurad Niazov est mort ce matin
Le président à vie (ou devrait-on plutôt dire le dictateur fou) du Turkménistan, Saparmurad Niazov, est décédé ce jeudi 21 décembre, à l'âge de 66 ans, selon des médias d'Etat. Le président serait mort d'une crise cardiaque vers 4 h 30 locales (0 h 30 à Paris).
Saparmurad Niazov se faisait appeler "Turkmenbachi" par son peuple, ce qui signifie "le petit père des Turkmènes". Il avait créé autour de lui un véritable culte de la personnalité, se faisant passer pour un prophète de Mahomet et s'attribuant tous les pouvoirs : président, premier ministre, chef des armées et leader du Parti démocratique (unique formation politique autorisée et reconnue officiellement dans le pays). Cet ex-premier secrétaire du Parti communiste turkmène au temps de l'URSS avait pourtant été élu président par le Parlement en 1990. L'année suivante, la population s'était très majoritairement prononcée en faveur de l'indépendance. Puis le pays avait basculé progressivement sous la dictature de son président.
Sous le joug du Turkmenbashi
Derrière les barbelés, le peuple turkmène tremblait en silence, dans la misère et l'ignorance, victime des lubies de son Turkmenbashi. Tandis que le président s'enrichissait grâce au gaz et au pétrole dont regorge le sous-sol turkmène, tout en faisant bonne figure, la situation de son peuple était de plus en plus préoccupante : presse et médias soumis à la censure, autorisés uniquement à faire l'apologie des actes de Niazov, éducation réduite à enseigner le "Ruhnama", livre écrit par Niazov... Même le service médical était bridé, et les médecins n'avaient pas le droit de révéler le véritable diagnostic à leurs patients : car Niazov l'avait décidé, le peuple turkmène était solide et en bonne santé.
Le président, lui, avait pourtant subi en 1997 un pontage coronarien, et en octobre dernier, il avait indiqué prendre des médicaments trois fois par jour pour une "maladie au cœur". Mais son médecin personnel, sans doute aussi victime de la censure et de la pression collective, avait assuré que le président était en excellente santé : "Comme toujours, le président est plein de vie et se sent très bien", avait-il indiqué à l'agence d'Etat.
Quel avenir pour le pays ?
Le gouvernement turkmène s'est réuni jeudi matin, aussitôt après la mort du dictateur. Une commission spéciale a été désignée pour organiser les obsèques du chef de l'Etat, qui auront lieu le 24 décembre. Cette commission sera présidée par le vice-premier ministre, Kurbanguli Berdimukhamedov. Ce dernier serait, selon des sources proches de l'opposition, un parent de Niazov. A l'époque de l'Union soviétique, les responsables des obsèques de chefs d'Etat succédaient souvent à ceux-ci, mais on ignore si cette "tradition" sera respectée cette fois-ci. Mais les politiques intérieure et extérieure du Turkménistan resteraient vraisemblablement inchangées.
Les observateurs craignent qu'en l'absence d'un successeur désigné, le Turkménistan ne bascule dans l'instabilité, ses remplaçants potentiels ayant été limogés ou emprisonnés. D'autant qu'en établissant son régime totalitaire, Saparmurad Niazov a réduit à néant l'influence traditionnelle des clans turkmènes.
Sources : Le Monde, AFP, Envoyé Spécial, RSF...
Une image de la propagande de Niazov.
A l'arrière-plan, on distingue le monument d'Ashgabat
construit en son honneur : une statue de lui face au soleil,
tournant sur elle-même pour que son visage
soit toujours radieux et éclairé.